Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans l’écriture et la réalisation d’un long-métrage alors que la musique est si présente dans votre vie ?
J’ai été envahie par le désir de ce film, je ne m’y attendais pas. J’écris beaucoup, depuis toujours. Des chansons, des billets d’humeurs et des histoires courtes. Mais je n’avais encore jamais eu l’envie d’écrire un film. D’ailleurs je pense que c’est le désir de cette histoire qui a fait de moi la réalisatrice de ce film, et non le désir d’être réalisatrice.
Qui est Rose ? Par qui vous a-t-elle été inspirée pour qu’elle paraisse si vraie, si réelle, si vivante ?
J’organise souvent des dîners chez moi où se mêlent les cultures et les générations, j’aime les tables bruyantes et généreuses. Un soir, ma cousine est venue avec la dernière grand-mère de ma famille qui venait de perdre son mari. Elle était plongée dans une profonde tristesse.
À cette même table, ce soir-là, il y avait Marceline Loridan-Ivens (rescapée des camps qui était dans le même convoi que Simone Veil pour Auschwitz, auteure de magnifiques ouvrages). Marceline était une survivante dans tous les sens du terme. Elle était plus qu’en vie, elle réveillait les endormis. Elle avait une gouaille, un panache, une sensualité, un appétit de vie extraordinaire.
J’ai vu ma grand-mère totalement chamboulée par la vision de cette femme libre et vivante. Elle était fascinée. J’ai senti dans son regard et vu sur ses joues qui devenaient roses qu’elle osait s’interroger sur le fait que sa vie n’était peut-être pas terminée et qu’il y avait des choses à vivre encore...
Qu’elle n’était peut-être pas juste une mère, une grand-mère et une veuve mais qu’elle était femme aussi. Et j’ai rêvé à cette possibilité et à son aventure, à une révolution intime à un âge où l’on nous range, mais où l’on se range soi-même aussi, dans une dernière case. Une fois les convives partis, j’ai écrit l’histoire de Rose. Cette fois-ci je sentais bien qu’il ne s’agissait pas d’une chanson...
Pouvez-vous nous parler du sujet de votre film ?
Je suis, comme beaucoup d’artistes, toujours habitée par les mêmes questions. La pluralité du féminin est un thème qui m’est cher, également les limites qu’on nous donne et surtout celles que l’on s’impose, les carcans culturels ou sociaux. Comment les envoyer valser et vivre pleinement nos paradoxes. Cela m’a intéressé de pouvoir questionner tous ces sujets qui m’obsèdent sur un support différent.
Une même femme porte en elle des choses si complexes et contraires. J’aime penser qu’on a le droit d’être à la fois la maquillée et la démaquillée, la profonde et la légère, la maman et la putain, le viril et le féminin, et tant d’autres encore. La voix des femmes perturbe, la liberté des femmes perturbe, alors celle des grands-mères et des veuves n’en parlons pas ! (rire)
Rose est inspirée essentiellement par les femmes de ma vie, mes grands-mères, ma mère, mes tantes, et par mon désir et mon bonheur immense de les voir, ou de les imaginer se libérer, renaître et se découvrir.
Vieillir c’est le chemin que nous prenons tous, il y a ici quelque chose à décomplexer...
Rose est une femme composite, un ensemble de femmes que j’ai croisé dans ma vie. Mais on raconte aussi toujours un peu son histoire, et même si le personnage a presque 80 ans, je raconte quelque chose de moi dedans. À 30 ans j’ai cru que j’étais vieille, trop vieille.
Quand le père de mes enfants est parti, je me suis retrouvée seule avec nos deux filles toutes petites et j’ai cru que le monde s’écroulait... que je n’étais plus qu’une mère, que pour la femme c’était trop tard... C’est idiot peut-être mais je l’ai vécu ainsi... et puis la vie m’a offert de me découvrir et de renaître comme je ne m’imaginais pas. On ne soupçonne jamais vraiment qui on est, et la pulsion de vie qui peut advenir après un deuil quel qu’il soit.
J’ai voulu que Rose ait cet âge avancé parce que ça me permettait d’aller au bout de mon idée et de pouvoir parler du fait que le désir est toujours présent dans la vie jusqu’au bout, et qu’il est terrible d’invisibiliser, d’étouffer ou de rendre tabou celui des femmes.
Aborder, sur grand écran, la « révolution » intime d’une femme septuagénaire... Vous a-t-on dit que c’était assez... « culotté » ?
Même si cela n’a pas été formulé de cette façon-là, les premiers producteurs que j’ai rencontré m’ont poliment expliqué qu’il serait judicieux que, pour des questions de « crédibilité », je « rajeunisse » un peu Rose. Mais qu’est-ce qui dérange à ce point dans le fait qu’une femme en âge d’être grand-mère décide de jouir de la vie comme elle l’entend ?
Je ne suis pas une va-ten-guerre, mais, et tant pis si je me répète, je trouve inacceptable qu’on puisse imposer aux personnes âgées et notamment aux femmes, de s’arrêter de mener leur vie comme elles l’entendent.
J’ai été très remuée, choquée même, par ce que j’ai entendu ici et là au début de la pandémie. Que ce n’était pas si grave si la Covid touchait les « vieux » parce que, somme toute, ces « gens-là » avaient suffisamment vécu. Mais qui peut décider de l’âge auquel il faut s’arrêter ?
Au-delà du portrait d’une femme, quels sont les autres thèmes que vous vouliez aborder dans Rose ?
Le couple, la fidélité, la place dans la fratrie, la famille, les contradictions et évidemment, la cuisine ! La peur qu’on a pour les mères de les voir défaillir mais aussi de les voir libres.
J’ai aimé travailler des personnages masculins sensibles, fragiles, se questionnant, des anti-héros hyper attachants, ayant tous un désir fort de paternité... Je crois que tous les hommes dans ce récit sont des hommes que j’aime, ne me demandez pas pourquoi... J’en parlerai à mon psy ! (rire)
À travers ses couleurs, ses bruits, ses discussions, ses disputes, ses danses et ses chansons, votre film véhicule une grande convivialité, et quelque chose de très authentique...
J’ai grandi dans une famille juive tunisienne, bruyante, joyeuse, absolument pas religieuse, où les traditions se mangent, se chantent, se dansent, où les blagues commencent en français et finissent en arabe, et où les bracelets aux poignets des femmes sont des percussions qui nous bercent. On ne peut jamais se passer longtemps les uns des autres. On se dispute sans jamais arrêter de s’aimer.
Je viens d’un milieu où la pudeur et les silences se cachent dans le bruit, où la tribu est omniprésente, où l’on se dit qu’on s’aime par la nourriture qu’on partage ou par celle qu’on cuisine, où même la tristesse et le chagrin se vivent sur un air de fête...
Chez les orientaux, de la joie vient se loger à toutes les étapes de la vie, ça ne veut pas dire qu’on n’est pas tristes, ça veut juste dire qu’on n’arrête pas de se réunir, et de partager... Les traditions nous poussent à nous retrouver régulièrement, à ne pas se lâcher les uns les autres... Ça peut avoir des côtés un peu envahissants parfois (rire).
Avez-vous écrit en pensant à une actrice pour incarner Rose ?
En écrivant je pensais aux femmes de ma famille. J’avais besoin que ce film soit au plus près du réel. Les femmes orientales sont souvent considérées comme des mères avant tout. Leur liberté et leurs désirs sont tabous. C’est leur révolution qui m’intéressait.
Qu’est-ce qui vous a le plus épaté chez elle ?
Sur le plateau j’ai aimé son engagement très fort, son sens du travail, sa générosité, son courage, sa vivacité, son peps, son endurance et la façon qu’elle a de tout donner, tout le temps, sa beauté et son humour. Rose est un rôle lourd, difficile, exigeant.
Françoise était quasiment de tous les plans. Elle y a mis de son sang et de son cœur et c’est très palpable à l’image. Cette femme m’a bouleversée. Dans Rose, elle exprime des émotions très diverses. Cela nécessite énormément de concentration et une grande souplesse de jeu de la part de son interprète. Françoise a été incroyable d’intelligence, d’écoute et d’abandon.
Dans les scènes de séduction, elle a fait preuve d’un panache extraordinaire. Quand on n’a plus vingt ans, ce n’est pas rien d’offrir à l’image quelque chose de sa sensualité et de sa sexualité -et dans les scènes plus légères, elle s’est montrée d’une formidable drôlerie.
J’ai rarement vu une comédienne prendre autant de plaisir à jouer. Je pense qu’elle va subjuguer tous ceux qui viendront voir le film et au-delà. J’espère qu’elle va aider les femmes à se libérer, et à ne pas craindre le temps.
Comment s’est imposée Françoise Fabian ?
Quand j’ai terminé la première version du scénario, j’ai tout de suite pensé à elle. Pour moi, elle est totalement cette femme plurielle, qui assume son âge et ne s’en est jamais caché. Et puis elle porte en elle cet orient chaleureux qui m’est si cher et familier. Elle a grandi en Algérie.
Elle a l’audace, la sensualité, l’humour, la gourmandise, la gravité aussi de celles qui ont traversé des tempêtes. Je l’ai rencontrée pour la première fois après qu’elle ait lu le scénario. Nous étions chez elle sur son canapé. Elle a pris ma main et m’a dit qu’elle voulait être cette femme, qu’elle était Rose, qu’il fallait que je lui promette qu’il n’y en avait aucune autre.
Elle m’a dit qu’aujourd’hui le cinéma ne propose pas de rôles comme ça aux femmes de son âge, qu’elles ne sont plus bonnes qu’à jouer les grands-mères... Elle avait une envie absolue d’interpréter cette révolution intime. Un désir clair.
C’est irrésistible. C’était magique, une véritable rencontre, une évidence. Entre elle et moi il y a quelque chose de très fort. Je crois qu’on s’aime beaucoup. Au-delà du rôle j’ai rencontré une amie, une sœur, un nouveau membre de ma famille. Les générations qui nous séparent ne nous séparent pas, au contraire, nous avons beaucoup en commun, un amour fou pour notre indépendance, un sens de la joie et une pulsion de vie qui nous animent profondément.
À qui s’adresse Rose ?
Aux filles, aux femmes, aux mères, aux grands-mères et aux hommes qui les aiment ! Aux gourmands aussi évidemment... J’espère que ce film décomplexera et modifiera le regard que nous portons sur l’âge et le temps.
J’ai été envahie par le désir de ce film, je ne m’y attendais pas. J’écris beaucoup, depuis toujours. Des chansons, des billets d’humeurs et des histoires courtes. Mais je n’avais encore jamais eu l’envie d’écrire un film. D’ailleurs je pense que c’est le désir de cette histoire qui a fait de moi la réalisatrice de ce film, et non le désir d’être réalisatrice.
Qui est Rose ? Par qui vous a-t-elle été inspirée pour qu’elle paraisse si vraie, si réelle, si vivante ?
J’organise souvent des dîners chez moi où se mêlent les cultures et les générations, j’aime les tables bruyantes et généreuses. Un soir, ma cousine est venue avec la dernière grand-mère de ma famille qui venait de perdre son mari. Elle était plongée dans une profonde tristesse.
À cette même table, ce soir-là, il y avait Marceline Loridan-Ivens (rescapée des camps qui était dans le même convoi que Simone Veil pour Auschwitz, auteure de magnifiques ouvrages). Marceline était une survivante dans tous les sens du terme. Elle était plus qu’en vie, elle réveillait les endormis. Elle avait une gouaille, un panache, une sensualité, un appétit de vie extraordinaire.
J’ai vu ma grand-mère totalement chamboulée par la vision de cette femme libre et vivante. Elle était fascinée. J’ai senti dans son regard et vu sur ses joues qui devenaient roses qu’elle osait s’interroger sur le fait que sa vie n’était peut-être pas terminée et qu’il y avait des choses à vivre encore...
Qu’elle n’était peut-être pas juste une mère, une grand-mère et une veuve mais qu’elle était femme aussi. Et j’ai rêvé à cette possibilité et à son aventure, à une révolution intime à un âge où l’on nous range, mais où l’on se range soi-même aussi, dans une dernière case. Une fois les convives partis, j’ai écrit l’histoire de Rose. Cette fois-ci je sentais bien qu’il ne s’agissait pas d’une chanson...
Pouvez-vous nous parler du sujet de votre film ?
Je suis, comme beaucoup d’artistes, toujours habitée par les mêmes questions. La pluralité du féminin est un thème qui m’est cher, également les limites qu’on nous donne et surtout celles que l’on s’impose, les carcans culturels ou sociaux. Comment les envoyer valser et vivre pleinement nos paradoxes. Cela m’a intéressé de pouvoir questionner tous ces sujets qui m’obsèdent sur un support différent.
Une même femme porte en elle des choses si complexes et contraires. J’aime penser qu’on a le droit d’être à la fois la maquillée et la démaquillée, la profonde et la légère, la maman et la putain, le viril et le féminin, et tant d’autres encore. La voix des femmes perturbe, la liberté des femmes perturbe, alors celle des grands-mères et des veuves n’en parlons pas ! (rire)
Rose est inspirée essentiellement par les femmes de ma vie, mes grands-mères, ma mère, mes tantes, et par mon désir et mon bonheur immense de les voir, ou de les imaginer se libérer, renaître et se découvrir.
Vieillir c’est le chemin que nous prenons tous, il y a ici quelque chose à décomplexer...
Rose est une femme composite, un ensemble de femmes que j’ai croisé dans ma vie. Mais on raconte aussi toujours un peu son histoire, et même si le personnage a presque 80 ans, je raconte quelque chose de moi dedans. À 30 ans j’ai cru que j’étais vieille, trop vieille.
Quand le père de mes enfants est parti, je me suis retrouvée seule avec nos deux filles toutes petites et j’ai cru que le monde s’écroulait... que je n’étais plus qu’une mère, que pour la femme c’était trop tard... C’est idiot peut-être mais je l’ai vécu ainsi... et puis la vie m’a offert de me découvrir et de renaître comme je ne m’imaginais pas. On ne soupçonne jamais vraiment qui on est, et la pulsion de vie qui peut advenir après un deuil quel qu’il soit.
J’ai voulu que Rose ait cet âge avancé parce que ça me permettait d’aller au bout de mon idée et de pouvoir parler du fait que le désir est toujours présent dans la vie jusqu’au bout, et qu’il est terrible d’invisibiliser, d’étouffer ou de rendre tabou celui des femmes.
Aborder, sur grand écran, la « révolution » intime d’une femme septuagénaire... Vous a-t-on dit que c’était assez... « culotté » ?
Même si cela n’a pas été formulé de cette façon-là, les premiers producteurs que j’ai rencontré m’ont poliment expliqué qu’il serait judicieux que, pour des questions de « crédibilité », je « rajeunisse » un peu Rose. Mais qu’est-ce qui dérange à ce point dans le fait qu’une femme en âge d’être grand-mère décide de jouir de la vie comme elle l’entend ?
Je ne suis pas une va-ten-guerre, mais, et tant pis si je me répète, je trouve inacceptable qu’on puisse imposer aux personnes âgées et notamment aux femmes, de s’arrêter de mener leur vie comme elles l’entendent.
J’ai été très remuée, choquée même, par ce que j’ai entendu ici et là au début de la pandémie. Que ce n’était pas si grave si la Covid touchait les « vieux » parce que, somme toute, ces « gens-là » avaient suffisamment vécu. Mais qui peut décider de l’âge auquel il faut s’arrêter ?
Au-delà du portrait d’une femme, quels sont les autres thèmes que vous vouliez aborder dans Rose ?
Le couple, la fidélité, la place dans la fratrie, la famille, les contradictions et évidemment, la cuisine ! La peur qu’on a pour les mères de les voir défaillir mais aussi de les voir libres.
J’ai aimé travailler des personnages masculins sensibles, fragiles, se questionnant, des anti-héros hyper attachants, ayant tous un désir fort de paternité... Je crois que tous les hommes dans ce récit sont des hommes que j’aime, ne me demandez pas pourquoi... J’en parlerai à mon psy ! (rire)
À travers ses couleurs, ses bruits, ses discussions, ses disputes, ses danses et ses chansons, votre film véhicule une grande convivialité, et quelque chose de très authentique...
J’ai grandi dans une famille juive tunisienne, bruyante, joyeuse, absolument pas religieuse, où les traditions se mangent, se chantent, se dansent, où les blagues commencent en français et finissent en arabe, et où les bracelets aux poignets des femmes sont des percussions qui nous bercent. On ne peut jamais se passer longtemps les uns des autres. On se dispute sans jamais arrêter de s’aimer.
Je viens d’un milieu où la pudeur et les silences se cachent dans le bruit, où la tribu est omniprésente, où l’on se dit qu’on s’aime par la nourriture qu’on partage ou par celle qu’on cuisine, où même la tristesse et le chagrin se vivent sur un air de fête...
Chez les orientaux, de la joie vient se loger à toutes les étapes de la vie, ça ne veut pas dire qu’on n’est pas tristes, ça veut juste dire qu’on n’arrête pas de se réunir, et de partager... Les traditions nous poussent à nous retrouver régulièrement, à ne pas se lâcher les uns les autres... Ça peut avoir des côtés un peu envahissants parfois (rire).
Avez-vous écrit en pensant à une actrice pour incarner Rose ?
En écrivant je pensais aux femmes de ma famille. J’avais besoin que ce film soit au plus près du réel. Les femmes orientales sont souvent considérées comme des mères avant tout. Leur liberté et leurs désirs sont tabous. C’est leur révolution qui m’intéressait.
Qu’est-ce qui vous a le plus épaté chez elle ?
Sur le plateau j’ai aimé son engagement très fort, son sens du travail, sa générosité, son courage, sa vivacité, son peps, son endurance et la façon qu’elle a de tout donner, tout le temps, sa beauté et son humour. Rose est un rôle lourd, difficile, exigeant.
Françoise était quasiment de tous les plans. Elle y a mis de son sang et de son cœur et c’est très palpable à l’image. Cette femme m’a bouleversée. Dans Rose, elle exprime des émotions très diverses. Cela nécessite énormément de concentration et une grande souplesse de jeu de la part de son interprète. Françoise a été incroyable d’intelligence, d’écoute et d’abandon.
Dans les scènes de séduction, elle a fait preuve d’un panache extraordinaire. Quand on n’a plus vingt ans, ce n’est pas rien d’offrir à l’image quelque chose de sa sensualité et de sa sexualité -et dans les scènes plus légères, elle s’est montrée d’une formidable drôlerie.
J’ai rarement vu une comédienne prendre autant de plaisir à jouer. Je pense qu’elle va subjuguer tous ceux qui viendront voir le film et au-delà. J’espère qu’elle va aider les femmes à se libérer, et à ne pas craindre le temps.
Comment s’est imposée Françoise Fabian ?
Quand j’ai terminé la première version du scénario, j’ai tout de suite pensé à elle. Pour moi, elle est totalement cette femme plurielle, qui assume son âge et ne s’en est jamais caché. Et puis elle porte en elle cet orient chaleureux qui m’est si cher et familier. Elle a grandi en Algérie.
Elle a l’audace, la sensualité, l’humour, la gourmandise, la gravité aussi de celles qui ont traversé des tempêtes. Je l’ai rencontrée pour la première fois après qu’elle ait lu le scénario. Nous étions chez elle sur son canapé. Elle a pris ma main et m’a dit qu’elle voulait être cette femme, qu’elle était Rose, qu’il fallait que je lui promette qu’il n’y en avait aucune autre.
Elle m’a dit qu’aujourd’hui le cinéma ne propose pas de rôles comme ça aux femmes de son âge, qu’elles ne sont plus bonnes qu’à jouer les grands-mères... Elle avait une envie absolue d’interpréter cette révolution intime. Un désir clair.
C’est irrésistible. C’était magique, une véritable rencontre, une évidence. Entre elle et moi il y a quelque chose de très fort. Je crois qu’on s’aime beaucoup. Au-delà du rôle j’ai rencontré une amie, une sœur, un nouveau membre de ma famille. Les générations qui nous séparent ne nous séparent pas, au contraire, nous avons beaucoup en commun, un amour fou pour notre indépendance, un sens de la joie et une pulsion de vie qui nous animent profondément.
À qui s’adresse Rose ?
Aux filles, aux femmes, aux mères, aux grands-mères et aux hommes qui les aiment ! Aux gourmands aussi évidemment... J’espère que ce film décomplexera et modifiera le regard que nous portons sur l’âge et le temps.