Les vieux fourneaux 2, Bons pour l'asile : entretien avec le réalisateur Christophe Duthuron

Alors que « Les vieux fourneaux 2, Bons pour l’asile » vient de sortir sur grand écran, on retrouve avec bonheur nos trois vieux « potes » qui s’embarquent dans de nouvelles aventures : Eddy Mitchell, Pierre Richard et Roland Giraud. Entretien avec le réalisateur Christophe Duthuron.

PAR SENIORACTU.COM | Publié le 18/08/2022

Vous aviez pris les commandes de la réalisation pour le premier volet des Vieux Fourneaux, vous revoici sur le deuxième. Par fidélité ? Par envie ? Par passion ?
La question ne s’est pas posée. Le premier film était un bon souvenir pour tout le monde, et quand il s’est agi de tourner un deuxième volet, les producteurs sont venus me le proposer.
 
Ça a pris un peu de temps parce que nous tenions absolument, les comédiens et moi, à travailler de nouveau sur un scénario de l’auteur de la BD, Wilfrid Lupano, qui a une actualité chargée.
 
Quand le scénario a été prêt, mis à part Roland Giraud qui avait dû, à regret, déclarer forfait pour raison de santé, nous nous sommes tous déclarés partants pour cette nouvelle histoire.
 
Personnellement j’étais d’autant plus enthousiaste qu’outre les comédiens, on allait passer plus de deux mois dans le Sud-Ouest, ma région natale qui me manque tant.
 
Petite parenthèse : qu’est-ce qui vous plaît tant chez Wilfrid ?
J’ai pour lui autant d’estime que d’affection, ce qui est rare. C’est un auteur brillant et l’homme est à la hauteur de ce qu’on espère quand on le lit. Ironique et aimant, exigeant et léger.
 
Son érudition est d’abord un appétit, une curiosité, dont il ne tire pas d’arrogance. Son regard sur le monde est en perpétuel mouvement. La diversité de sa production en témoigne, tout l’intéresse.
 
Le côtoyer est un vrai bonheur. Et quel culot d’avoir choisi des « vieux » pour héros, à une époque où personne n’y croyait. Aujourd’hui, tout le monde s’est engouffré dans la brèche !
 
Sur le film, les comédiens étaient très heureux d’avoir à dire ses dialogues. Drôles, et surtout extrêmement précis. On les a respectés à la virgule. Comme du Shakespeare. Ceux qui avaient la tentation de faire de petites impros, comme c’est parfois la mode, se rendaient vite compte qu’elles valaient moins que ce qui était écrit. C’est une partition.
 
Une petite musique. Je n’ai rien modifié sans son aval. Cette rigueur n’est pas une contrainte, c’est l’inverse, c’est du confort.
 
Comment travaillez-vous avec Wilfrid ?
Ensemble et séparément. On a parlé ensemble de la structure du scénario, de sa thématique, de sa mise en image, etc., mais, ensuite, Wilfrid a écrit seul. Quand il a eu fini, il m’a fait lire son texte. Nous en avons discuté, beaucoup échangé, pris des décisions communes… qu’il est reparti mettre en forme.
 
Bref, c’est lui qui tient le stylo. Et sur le plateau, c’est l’inverse. Il regarde, suggère, interroge telle ou telle décision, précise des intentions qui ont pu m’échapper, et me laisse les «interpréter». Je crois pouvoir dire qu’on se comprend et s’entend très bien.
 
Quand on est en charge du traitement visuel d’une BD, comment procède-t-on ?
Je ne peux parler que de mon expérience. J’ai essayé d’être absolument fidèle à «l’esprit», puisque le langage de cinéma trahit nécessairement la « lettre ». Ensuite, je me suis affranchi des plans fixes un peu « cases » que j’avais utilisés pour le premier.
 
J’ai privilégié l’énergie des acteurs, le jeu, le mouvement. J’ai quand même glissé, dans chaque séquence, un plan qui pourrait sortir de l’album.
 
Venons-en aux trois héros de l’histoire… Ils montrent une telle énergie qu’on a l’impression qu’ils ont mangé du lion, surtout Pierre Richard qui vocifère à tout va et mouline sec avec sa béquille !
C’est d’autant plus incroyable que Pierre est l’aîné des trois. À 88 ans, son appétit de vie est intact. Quand le tournage s’est confirmé, il avait très mal au genou. S’il s’était fait opérer, c’était trois mois de rééducation, ça compromettait le film. Il a préféré s’entraîner à marcher avec sa rotule en vrac. Il était très mobile sur le plateau, mais quand même !
 
Pour le soulager, on a trouvé cette idée de béquille. Je craignais que, malgré son énergie, l’image de la béquille ait une connotation trop médicale, qu’elle soit le rappel permanent d’un empêchement. On l’a donc « customisée » comme un couteau suisse, bourrée de gadgets, à la James Bond, pour qu’elle soit ludique avant tout. Il s’est amusé avec comme un gamin.
 
Eddy Mitchell a l’air aussi en pleine forme. Il a toujours autant de drôlerie, qu’il tire la gueule ou joue les fleurs bleues ! Comment a-t-il pris le fait qu’il allait tous les jours recevoir en pleine poire une bonne pelletée de fumier ?
Je crois que ça l’a amusé. Eddy partage avec Pierre et Bernard d’avoir un grand sens de l’humour. Dès qu’ils sont ensemble, c’est trois gosses.
 
Et Bernard Le Coq ? Comment s’est passée son arrivée dans le trio ?
Tout le monde l’a accueilli à bras ouverts. Il a été formidable. Il s’évertue à faire croire l’inverse, mais il a énormément travaillé. Il n’a jamais été question de faire oublier Roland, ou de le copier.
 
Il s’est agi de se rapprocher de l’Antoine de la BD, d’en livrer sa propre interprétation, comme un jazzman qui donne sa version personnelle d’un standard, se l’approprie, l’interprète. Je l’y trouve formidable.
 
Surprise ! Vous vous êtes octroyé un petit rôle. Est-ce un petit clin d’œil à Hitchcock et à son péché mignon pour les cameos ?…
Ah non, c’est un pur hasard. Le comédien qui devait jouer la séquence est tombé malade. Je l’ai remplacé au pied levé.
 
À qui s’adresse ce nouveau volet des Vieux Fourneaux ?
Je l’espère ouvert à tous, malgré son thème. Je ne le voulais pas moralisateur ni destiné à prêcher des convaincus. Il laisse ouvert le débat et ne pose que la question de la dignité. Il donne une autre façon de voir les choses, comme une vigie. Il plante une graine. J’espère.
 
Où pourra-t-on vous retrouver à la rentrée ? Sur une scène de théâtre avec Pierre Richard ou sur un plateau de ciné ?
Un mix des deux. Je devrais démarrer un film en Lot et Garonne avec… Pierre Richard. Le bonheur, quoi.










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